De "bonne fée" à "four"

 

Quand les clients de GPA sont reçus dans les médias pour témoigner de leur expérience, ils ne tarissent pas de termes élogieux pour désigner la mère porteuse (surtout si elle les accompagne): "la marraine-fée", "le bon ange", la "tante" etc.  Mais les contrats qu'ils ont signé utilisent des termes plus prosaïques.

 

Les mères porteuses y sont désignées par le terme "porteuse gestationnelle" (gestationnal carrier).  Rendre acceptable la marchandisation et la chosification des êtres humains exige de les déshumaniser.  Les mots "méres", "femmes" et même "personnes" n'apparaissent pas dans ces contrats pour désigner la mère porteuse.

 

Certaines femmes iront jusqu'à se comparer elles-mêmes à des appareils électro-ménagers pour se dissocier psychologiquement de l'enfant qu'elles portent: "[...que le bébé avait le bagage génétique de ses parents et qu'elle faisait seulement prêter le four". 

 

C'est par cette comparaison douteuse que certaines mères porteuses justifient à leurs autres enfants qu'elles peuvent disposer de cet enfant (mais pas d'eux).  Les enfants doivent intégrer ces mensonges car après tout, eux aussi ils ont été "dans ce four " (sic).  Pourquoi maman m'a-t-elle gardé et pas ma petite soeur?  Peut-elle me donner à des étrangers aussi?  Pourquoi peut-on disposer de certains enfants, en fonction de la façon dont ils ont été conçus?

 

 

Dans sa thèse de doctorat intitulée " « Médiation procréative et maternités assistées Vers une approche relationnelle et pragmatique de la gestation pour autrui et du don d’ovules au Canada »,   ( LAVOIE, K. (2019),Université de Montréal), une mère porteuse témoigne ainsi de son expérience (p. 291).

 

À noter l'affligeant langage internalisé par Élise.  Elle ne dit pas "je ne suis pas un four", mais bien "je ne suis pas qu'un four".

 

"Je dis « le four », parce que j’ai un t-shirt qui dit « A bun in the oven » et je trouve ça vraiment cute. C’est une image que je trouve mignonne dans le sens où je n’ai pas d’implication génétique avec le bébé, et que les gens le comprennent bien avec cette image-là. Évidemment, je ne suis pas qu’un four…ça serait niaiseux de prendre ça au premier degré; il y a beaucoup plus que ça dans cette aventure-là."

- Élise, mère porteuse

 

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