GENEVIÈVE
Crédit photo : KrisCole from GettyImage
Geneviève est une mère porteuse québécoise qui a participé aux consultations de la thèse doctorale (p. 249) de K. Lavoie. Elle avait reçu les doses massives d'hormones pour préparer son corps à l'implantation d'un embryon. Après deux GPA elle a été atteinte d'un cancer de l'utérus. Elle a dû faire un deuil de sa fertillité après une hystérectomie. Étant donné l'échantillonnage très faible de la cohorte étudiée (15 mères porteuses), il est préoccupant avoir noté un cancer de l'utérus dans cette étude:
"Geneviève a quant à elle dû subir une hystérectomie pour éviter la propagation d’un cancer causé selon elles par la prise successive de fortes doses d’hormones lors de ses deux expériences de GPA : J’ai eu des complications après avoir accouché. À cause de la médication pour inciter la grossesse…c’était trop demander à mon corps. Il était déjà parfaitement capable de fonctionner sans médication. De quadrupler ses besoins avec des hormones, ça l’a détruit. J’ai dû subir une hystérectomie complète à cause de ça. (Geneviève, femme porteuse).
L’ablation de son utérus a mis fin à ses projets d’avoir d’autres enfants pour elle-même ou, encore, de vivre une troisième grossesse pour autrui. La joie d’avoir contribué à fonder ainsi deux familles se mélange au deuil de la stérilisation, une douleur partagée par la mère d’intention de son premier projet de GPA avec qui elle entretient toujours une grande complicité. Quand j’ai eu ma chirurgie pour mon utérus, elle [la mère d’intention] m’a appelé la veille, et elle m’a dit : « Ça m’affecte tellement que tu doives le perdre. Ton utérus, c’est comme le mien. J’ai l’impression de revivre une deuxième fois mon hystérectomie ». (Geneviève, femme porteuse)"
KAYLENE
Crédit photo: Amanda Lucier for The Free Press)
Kayleneest une pourvoyeuse d'ovocytes états-unienne. Les pourvoyeuses d'ovocytes sont, avec les mères porteuses, les ressources humaines les plus primées de l'industrie de la GPA. Dans sa vingtaine, Kaylene s'est prêté six fois à des ponctions d'ovocytes.
Aujourd'hui âgée de 36 ans, elle devra subir une hystérectomie en raison d'une endométriose et d'une adénomyose sévères, des affections débilitantes dans lesquelles le tissu endométrial se développe là où il ne devrait pas. Elle souffre de douleurs chroniques pendant l'exercice, l'ovulation et les rapports sexuels.
MALIA
Crédit photo : Sachith Ravishka Kokikara from Pexels
TRADUCTION
"Lorsque Malia est retournée à Los Angeles pour son sixième et dernier cycle , elle a été stimulée pour produire 56 ovules. Après le prélèvement, elle hurlait de douleur et demandait l'aide de Renate, qui aurait ignoré ses plaintes et lui aurait dit de prendre du Tylenol. Malia a essayé de voir le médecin qui avait pratiqué le prélèvement, mais il a lui aussi ignoré ses symptômes et a refusé de la voir ou de la soigner."
"La mère de Malia l'a mise dans l'avion suivant pour rentrer à Aruba, où elle a souffert de fortes douleurs pendant toute la durée du vol. Lorsque l'avion a touché le sol, une ambulance l'attendait sur le tarmac pour l'emmener à l'hôpital. En raison de sa forte production d'ovules, son ovaire avait gonflé et s'était tordu dans son corps - une complication connue sous le nom de « torsion ovarienne » - et avait dû être enlevé chirurgicalement."
SOURCE : (2021) Tober, D., Krolokke C. "Emotion, embodiment, and reproductive colonialism in the global human egg trade" p. 1781 - ARTICLE ORIGINAL: Gender, Bodies and Identities in Organizations : Post colonial Critiques Wiley
MELISSA
Crédit photo : Rodolfo Clix from Pexelx
SOURCE : L'expérience de Mélissa est relatée dans le livre "Eggonomics - The Global Market in Human Eggs and the Donors Who Supply Them" - Diane Tober - Editions Routledge p. 41
Melissa a partagé son dossier médical avec la chercheuse Diane Tober du projet Ovado
Avant sa sélection comme pourvoyeuse d'ovocytes, le médecin avait noté dans son dossier: "Ovaires semblant présenter un syndrome polykystique ovarien".
À sa première ponction ovarienne, Mélissa a "produit" 30 ovocytes. Elle a dû être alitée pendant une semaine après cette intervention pour "inconfort extrême" et ballonnements.
À chaque ponctions subséquentes le médecin a augmenté le dosage d'hormones, ce qui a eu pour effet de produire plus d'ovocytes à chaque fois en même temps qu' augmenter l'inconfort et les douleurs associées. Après le sixième "don" d'ovocytes elle a produit 59 ovocytes et a dû être hospitalisée pendant une semaine pour cause de ballonnements, difficultés à respirer, haute pression sanguine et caillots de sang dans les reins.
Non seulement le médecin savait qu'elle avait un syndrome polykystique ovarien mais il a pris avantage de cette situation et a stimulé ses ovaires de façon à tirer le plus d'ovocytes possible de cette pourvoyeuse. Cette condition médicale fait en sorte que les ovaires des femmes atteintes du sysndrome polykystique ovarien sont particulièrement réactifs aux stimulations hormonales. Elles sont aussi plus susceptibles que les autres de développer des complications médicales à court et à long terme.
SALLY
Sally Rhoads-Heinrichand est propriétaire et administratrice de l'agence Surrogacy in Canada Online.
Dans le Canadian Affairs du 1er janvier 2025, Sally est dépeinte par la journaliste comme "une passionnée de la maternité de substitution"
En 2000, Sally, une mère porteuse canadienne, a porté et mis au monde de jumeaux pour un couple du Maryland (USA). Elle a ensuite tenté de renouveler l'expérience d'être mère porteuse pour d'autres parents bénéficiaires et a subi 8 implantations d'embryons issus de fécondations in vitro mais n'a pu mener une autre grossesse à terme.
L'une des grossesses s'est terminé par une fausse-couche et a abouti à une chirurgie d'urgence. Elle a perdu une trompe de fallope, compromettant ses propres possibilités de redevenir enceinte.
CHRISTINE
Crédit Photo Mathew Bell
Source : "A First-time Egg Donor's Story In 28 Pictures"
Christine a un jour décidé de faire don de ses ovules pour la première fois. Elle a fait beaucoup de recherches en ligne et a choisi l'agence Egg Helpers et a été jumelée six mois plus tard avec des parents d'intention.
Christine n'avait jamais parlé à une personne ayant fait un don auparavant, mais elle voulait vraiment pouvoir aider un couple à avoir un bébé.
Lors de son rendez-vous de sélection, elle a posé des questions à son médecin sur le syndrome d'hyperstimulation ovarienne (SHO), un état dans lequel les ovaires sont surstimulés et où du liquide s'accumule dans l'abdomen. Dans les cas les plus graves, ce syndrome peut provoquer un accident vasculaire cérébral. Elle avait fait beaucoup de recherches à ce sujet et craignait que cela ne lui arrive.
Son médecin a balayé l'idée. Il lui a dit qu'il s'agissait d'un syndrome très rare et qu'elle serait surveillée de près au cours de la semaine précédant le prélèvement, avec des analyses de sang et des échographies, ce qui l'a rassurée.
Le 14 février 2016, Christine se rend pour la ponction ovarienne à Toronto (elle partait de Kingston en Ontario, soit 3 heures de train). Christine avait pris des injonctions hormonales pendant 12 jours et s'était injectée la veille de la ponction, l'injection qui déclenche la maturation des follicules contenus dans les ovaires (et leur transformation en ovocytes). Elle se sentait ballonée et épuisée. Le lendemain matin (jour de la ponction), elle a eu du mal à marcher les 5 minutes qui la séparait de l'hôtel à la clinique:
"La douleur dans mon estomac devenait de plus en plus difficile à supporter. J'avais l'impression d'avoir des cailloux dans le ventre - c'était une sensation horrible, sourde et lourde qui rendait même la marche épuisante. Mon ventre était si ferme et si sensible que porter un pantalon était inconfortable, car la ceinture qui m'allait normalement parfaitement s'enfonçait dans ma peau sensible. Je voulais quelque chose pour soulager la douleur, mais je n'avais le droit de rien avaler."
À son réveil, après la ponction, elle s'est sentie si mal qu'elle a pensé qu'elle n'allait pas survivre à cette intervention. Les infirmières s'inquiétaient de sa respiration (sa saturation en O2 ne cessait de chuter jusqu'à 80 % . Quand le personnel l'a jugé suffisamment rétablie, elle a été surpise d'ëtre autorisiée à retourner à l'hôtel.
Sous l'effet des médicaments elle a voulu s'arrêter à l'épicerie pour prendre de la nourriture, mais elle a failli vomir et a dû s'asseoir sur le plancher de l'épicerie pour récupérer.
De retour à l'hôtel la douleur était si violente qu'elle avait de la difficulté à marcher. Le lendemain matin elle a dû se rendre à la clinique pour une échographie. Le technicien a estimé qu'elle avait 700 ml de liquide dans l'abdomen. Son infirmière a consulté son médecin et ils ont déterminé qu'une aspiration de liquide devait être effectuée. Ils espéraient pouvoir l'hospitaliser en après midi:
"J'ai dû attendre jusqu'à plus de 14 heures pour l'aspiration du liquide. Cette fois, mon copain n'a pas pu m'accompagner. Cette expérience a été bien pire que ce que j'aurais pu imaginer. Tout le monde me promettait que je me sentirais beaucoup mieux une fois le liquide éliminé. La procédure elle-même a été incroyablement douloureuse. Je n'avais pas d'analgésique à part le Tylenol que l'infirmière m'avait donné deux heures avant l'aspiration. J'ai beaucoup pleuré et je me suis sentie très gênée de pleurer. Ils n'ont pu drainer que 250 ml, mais le médecin m'a rassurée en me disant qu'il n'y avait plus de liquide. Lorsque j'ai demandé si je devais revenir pour un examen, il m'a dit que ce n'était pas nécessaire - je me porterais bien à partir de maintenant et le liquide ne devrait pas revenir."
Christine a continué de souffrir jusqu'à une semaine après l'intervention.
"Mon corps ne ressemble pas à ce que j'ai l'habitude de voir et c'est un peu difficile pour moi. Malgré le fait que deux autres PI (parents d'intention) souhaitent que je fasse un don, je n'en ferai pas d'autre. Je me sens très coupable d'avoir dû les refuser, mais je ne peux pas me permettre de revivre cela. Cela a eu un impact énorme sur ma santé et ma vie quotidienne et c'est injuste pour ceux qui m'entourent.
EMMA
Crédit Photo CANVA @pexels
Source: "EGGonomics - The Global Market in Human Eggs and the Donors Who Supply Them" p. 75 - TOBER, D. , Routledge - 2024
Emma Chang est née en Chine sous la politique d'enfant unique du régime. Sa mère a dû interrompre une deuxième grossesse, un garçon, sous peine de perdre son emploi. Cette expérience a affecté Emma qui a souffert du "reproche" de la famille paternelle d'être née la première et d'être la "cause" que son père n'a pas pu avoir une descendance mâle.
À l'âge adulte, Emma est venue étudier aux États-Unis. À ce moment, elle avait pris la décision de ne jamais se marier ou avoir des enfants. Elle mentionne que cette décision était l'une des motivations à vendre ses ovocytes. Comme elle poursuivait une maîtrise dans une université prestigieuse (Ivy League), elle fût recrutée par l'agence "Elite Asian" et faisait partie de la section "Diamond donors", la "catégorie" de pourvoyeuses d'ovocytes la plus primée.
Emma témoigne que l'agence ne lui avait pas indiqué les procédures auxquelles elle devait se soumettre et a été "choquée" quand elle a reçu la boîte de médications et d'injections qu'elle devait prendre, elle qui n'avait même jamais eu recours à la pillule anti contraceptionnelle.
Après son premier "don" d'ovocytes, elle a senti que son corps était "différent". Elle s'est mise à souffrir de crampes menstruelles douloureuses. Sans qu'elle le sache, l'agence l'avait déjà jumelé à d'autres acheteurs mais elle refusa, même quand l'agence proposa de doubler la rémunération: "je pense que mon corps est trop sensible aux hormones" leur a-t-elle dit.
Un mois plus tard l'agence l'a recontacté et lui a dit que des parents d'intention cherchaient un profile semblable au sien depuis plus d'un an et qu'ils étaient prêts à lui offrit 50,000$. Elle proposa $75,000 et ils acceptèrent. Après ce deuxième don, les douleurs menstruelles ont empiré. L'agence l'a contacté de nouveau et elle refusa et demanda que son nom soit retiré de la banque de données, ce qui fût fait.
Au cours des années suivantes Emma a vu des spécialistes, des naturopathes, des médecins chinois pour essayer de savoir ce qui n'allait pas avec son corps ou comment le soigner. Elle a aussi rencontré un partenaire avec qui elle se maria et le couple a décidé d'avoir des enfants...mais ont été incapables de concevoir.
Le couple a consulté un médecin spécialisé en problèmes de fertilité et elle a été diagnostiquée au stade IV d'endométriose. Elle venait d'avoir 30 ans. Son mari et elles sont maintenant à la recherche d'une donneuse d'ovocytes et d'une mère porteuse. La même agence s'est proposé pour l'aider à réaliser son projet.
CATHERINE
Crédit Photo CANVA @pixabay
Source: ‘We simply don’t know’: Egg donors face uncertain long-term risks‘ , WOODRUFF, E. Stat, 28 janvier 2017
Catherine Fonseca, étudiante infirmière d'origine portugaise, a choisi de faire un don d'ovocytes à l'Association de Médecine Reproductive du New Jersey en 2014.
Après s'être injecté des hormones pour inciter ses ovaires à produire plus d'ovules pendant 10 jours, son abdomen avait tellement gonflé qu'elle ne pouvait plus rentrer dans son pantalon.
À la ponction d'ovocytes, les médecins ont récolté 59 ovocytes (la plupart des pourvoyeuses produisent entre 10 et 25 ovules).
Chacun de ces ovocytes deviendra la propriété du couple portugais qui a choisi Fonseca comme pourvoyeuse en raison de ses cheveux noirs lustrés, de ses grands yeux bruns brillants et de ses sourcils élégants et expressifs, autant de caractéristiques communes à l'ascendance portugaise.
Fonseca, qui avait 26 ans au moment du don, était motivée en partie par l'altruisme. Elle aimait l'idée d'aider un couple à concevoir et figurait également sur le registre de donneurs de moelle osseuse.
Lorsqu'elle s'est rendue à la clinique pour l'intervention d'extraction des ovocytes, elle avait encore un long chemin à parcourir. L'infirmière lui a donné du Tylenol avec de la codéine après le prélèvement d'ovules et l'a renvoyée chez elle. Quelques heures plus tard, elle se retrouvait aux urgences. Son tour de taille, qui est normalement de 28 pouces, mesurait maintenant 41 pouces. Typiquement, les ovaires sont de la taille d'une noix. Les siens avaient gonflé jusqu'à atteindre la taille d'un pamplemousse, déplaçant ses autres organes.
Les hormones ont fait monter en flèche son taux d'œstrogène et ses vaisseaux sanguins sont devenus moins perméables, provoquant des écoulements dans son abdomen. Ces conditions ont provoqué un épaississement du sang l'exposant à un risque élevé de formation de caillots à un emballement cardiaque.
Catherine a souffert du syndrome d'hyperstimulation ovarienne (SHO). Parfois, ce syndrome nécessite une simple intervention de drainage. Dans de rares cas, les femmes en meurent.
Pour Catherine, il a fallu six mois avant qu'elle ne se sente à nouveau normale, mais elle dit qu'après le SHO, elle a commencé à rencontrer d'autres problèmes médicaux qui ne l'étaient pas auparavant : kystes ovariens, tumeurs du col de l'utérus, 25 livres de poids en trop. Plus récemment, on lui a diagnostiqué une endométriose.
Mme Fonseca et les autres donneuses d'ovules sont averties que l'hyperstimulation est un risque à court terme. Elles sont également informées des effets psychologiques immédiats du don de matériel génétique, que l'American Society for Reproductive Medicine qualifie de « complexes ». Ces mises en garde figurent dans les documents de consentement éclairé que les donneurs signent.
Mais ces documents ne contiennent aucune information sur les risques potentiels à long terme, en raison de la rareté des recherches.
MAGGIE
Crédit Photo Robbie McClaran/Redux Pictures
Sources: Health Effects Of Egg Donation Not Well Studied , KFF Health News, Sandra G. Boodman, 21 juin 2016
'Being an egg donor gave me terminal cancer’ New York Post, 03 décembre 2015, Jane Ridley
Pendant qu'elle poursuivait des études collégiales en 2003, Maggie a eu l'idée d'agir comme pourvoyeuse d'ovocytes, à la fois pour aider une famille à avoir un enfant et aussi pour l'aider, elle et son conjoint, à se payer une maison.
Maggie a donné 9 autres fois entre 2003 et 2013 pour une rémunération totale de $20,000 (US). Quelques mois après avoir fait son dernier don, Maggie a appris qu'elle était atteinte d'un cancer du sein stade 4 avec metastases. Une condition médicale très rare pour une femme de son âge sans antécédent familial. Elle avait alors 34 ans et travaillait comme répartiteur au 911 à Seattle.
Quand elle a demandé à son oncologiste si ce cancer pouvait avoir été causé par ses dons d'ovocytes, celui-ci a répondu qu'il n'en savait rien et a ajouté: "Et bien, il y a des risques."
Même si Maggie croit que ses dons d'ovocytes sont la cause de ce cancer hormono-dépendant aux oestrogènes, les experts affirment que c'est impossible de le déterminer. Les recherches à long terme sur les pourvoyeuses d'ovocytes n'ont jamais été faites bien que cette pratique existe depuis plus 30 ans.
En avril 2025, Jennifer Lahl - présidente/fondatrice du Centre pour la bioéthique et la culture (CBC) et réalisatrice du film Eggsploitation: Maggie’s Story annonçait sur son compte Xque Maggie venait de recevoir un diagnostic de cancer du cerveau.
JESSICA
Crédit Photo CANVA Anne H from @Pexels
Sources: "Fatal colon cancer in a young egg donor: A physician mother’s call for follow-up and research on the long-term risks of ovarian stimulation" , (2008), Jennifer Schneider, M.D., Ph.D.
La fille du Dr Schneider lui a annoncé au téléphone qu'elle avait décidé de devenir donneuse d'ovules. Elle avait vu des affiches et des annonces dans les journaux sur le campus où elle étudiait en Californie et ces cliniques annonçaient qu'elles étaient à la recherche de donneuses d'ovules. Jessica a pensé que ce serait une bonne façon d'affirmer son indépendance financière.
Elle avait toujours espéré avoir des enfants et l'idée de pouvoir aider d'autres femmes à réaliser ce rêve l'attirait. Jessica était précisément le type de jeune femme ciblées par les annonceurs. C'était une étudiante d'honneur dans une université élite, polyvalente, athlétique, grande, attirante, et menait un mode de vie sain. Elle ne fumait pas, faisait de l'exercice et dansait, et était végétarienne.
L'agence avait assuré qu'elle avait recours à une clinique FIV réputée et des médecins expérimentés. Elle savait qu'il y avait un risque habituel de saignement ou d'infection lors du prélèvement des ovules, mais sinon, l'agence lui affirmait qu'il n'y a pas de problème. Le protocole utilisé était typique pour l'époque ; il comprenait 250 mg de leuproréline en injection sous-cutanée deux fois par jour pendant 2 à 3 semaines, 3 ampoules de Pergonal par jour, et 10 000 unités de hCG en injection intramusculaire.
Le premier cycle s'est bien déroulé et une grossesse en a résulté. Peu de temps après, l'agence l'a contactée pour un second receveur. Jessica s'apprêtait à déménager d'une côte des États-Unis à l'autre, alors elle a d'abord décliné. Mais cette fois, parce qu'elle était une donneuse d'ovules « confirmée », l'agence lui a offert beaucoup plus d'argent. C'était trop beau pour refuser. En tout, elle a fait trois cycles de prélèvement d'ovules en quelques mois. D'autres grossesses en ont résulté.
Quatre années plus tard Jessica était maintenant étudiante en cinéma, ainsi que compositrice. De retour d'un voyage au Japon, elle a commencé à se plaindre de douleurs abdominales. Une tentative de coloscopie a échoué en raison d'une obstruction intestinale sévère. Un scanner de son abdomen a révélé l'implication tumorale de son côlon et de ses deux ovaires ainsi qu'une carcinomatose péritonéale. L'analyse histologique des échantillons de biopsie a confirmé un cancer du côlon généralisé. Deux ans plus tard, après une chimiothérapie, une chirurgie et des radiations palliatifs pour les métastases osseuses et cérébrales, Jessica est décédée en juillet 2003. Elle avait 31 ans. Un test génétique ultérieur de son tissu n'a révélé aucune prédisposition génétique au cancer du côlon.
La mère de Jessica s'est impliquée dans la recherche et milite depuis plusieurs années pour la création d'un registre des pourvoyeuses d'ovocytes afin de pouvoir faire un suivi à long terme de ces jeunes femmes et documenter les risques à court, moyen et long terme de ces interventions.
AMELIA
Crédit Photo Aris Leoven BaseImage
Sources:
L'expérience d'Amelia est relatée dans le livre "Eggonomics - Tbe Global Market in Human Eggs and the Donors Who Supply Them" - Diane Tober - Editions Routledge p. 96
Amelia est une jeune fille de Caroline du Sud qui a été conçue avec don de sperme et élevée par une mère célibataire.
Elle a fait des études pour devenir infirmière et s'est intéressée tôt aux dons d'ovocytes car elle était sensible au deuil de sa mère qui avait vécu une grossesse ectopique et ne pouvait plus concevoir. À 23 ans elle a contacté une agence. Elle a été acceptée dans leur programme et a été choisie immédiatement par un couple de portugais (elle était elle-même d'origine portugaise et correspondait aux caractéristiques physiologiques souhaitées par la mère cliente).
Ayant été conçue par don de sperme, elle souhaitait que les enfants nés de son don puissent avoir accès à leurs origines à 18 ans, mais l'agence lui a indiqué que ce n'était pas possible.
Au septième jour d'injections hormonales (en général les pourvoyeuses d'ovocytes doivent en recevoir pendant une période de 12 à 14 jours), elle a ressenti un ballonement intense. Les injections sont devenues si douloureuses qu'elle a dû se résoudre à se les administrer couchée sur le plancher au cas où elle perdrait connaissance.
Au 10ème jour, la clinique l'a informé que son taux d'oestrogène était dangereusement élevé. On lui a ordonné de cesser les injections et de s'administrer l'injection qui déclencherait l'ovulation dès le lendemain pour pouvoir pratiquer la ponction dès que possible.
Après avoir extrait les ovocytes, la clinique a autorisé son retour à la maison. Dès qu'elle fût de retour chez elle, Amelia ne cherchait qu'à pouvoir se reposer et dormir. En se rendant aux toilettes, elle a perdu connaissance et s'est réveillée sur le plancher. Dès qu'elle a pu elle téléphoné à l'infirmière de la clinique qui lui a conseillé de boire des liquides. Après quelques heures une douleur intense s'est manifesté au point où elle a penser que les douleurs d'une crise cardiaque devait ressembler à cette douleur. Elle a rappelé l'infirmière qui lui a conseillé cette fois de prendre du Tylenol et de la codeine.
Au bout de quelques temps de douleurs insupportables, sa co-locataire l'a amenée aux urgences. On lui a administré du fentanyl pour soulager la douleur, mais elle la ressentait encore. Des ultrasons ont confirmé des saignements aux ovaires. Cette expérience lui a failli lui coûter ses ovaires (elle souhaitait avoir des enfants plus tard).
Après cette expérience douloureuse, l'agence a continué de l'appeler pour qu'elle renouvelle l'expérience parce qu'elle l'avait déjà jumelé avec un autre de couple-clients portugais.
Pendant les y mois qui ont suivi elle a vécu des cauchemars, a perdu du poids, ne dormait presque plus, ne mangeait presque plus. Elle s'est résigné à consulter un psycholoque qui lui a prescrit des anti-dépresseurs et a diagnostiqué un choc prost-traumatique.
Amelia avait produit 59 ovocytes et obtenu une compensation de $5000 pour ce don. Ses frais médicaux se sont élevés à $14,000.
ANNA
Crédit Photo Aris Leoven BaseImage
Source : "Is Egg Donation Dangerous?" - Alison Motluk (2013)
À son quatrième don d'ovocytes, Anna a quitté la Colombie-Britannique où elle habitait et a pris l'avion accompagnée de sa mère pour se rendre à la clinique de Toronto qui l'attendait pour faire une ponction d'ovocytes.
Apparemment, le médecin qui la suivait aurait omis de communiquer à la clinique de fertilité qu'elle avait produit beaucoup plus d'ovocytes qu'habituellement. Conséquemment, les doses hormonales qu'elle recevait n'ont pas été réduites. Anna vivait loin de la clinique de fertilité et le médecin qui la suivait et procédait à l'échographie recevait ses instructions du médecin de Toronto, notamment sur la posologie des médicaments. Ce n'est qu'à son arrivée à Toronto que le médecin qui devait extraire les ovocytes s'est aperçu qu'elle en avait beaucoup plus que prévu.
« Je me souviens m'être sentie très bien, tout à fait bien », se souvient Anna, en repensant à la soirée qui a suivi le prélèvement. Elle et sa mère sont même descendues dans le hall de l'hôtel pour dîner. Mais ensuite, raconte Anna, « je suis allée dans la salle de bains et j'ai vomi mes tripes ». Les choses ont empiré une fois qu'elle s'est couchée. Elle a commencé à se sentir essoufflée. Elle était ballonnée et « bouffie ». Et la douleur, qui s'étendait de sa cage thoracique à son bassin, était insupportable. Au moment de prendre l'avion pour rentrer chez elle, elle était si malade qu'elle a eu besoin d'un fauteuil roulant pour monter à bord.
Au cours des deux jours suivants, l'abdomen d'Anna a gonflé jusqu'à donner l'impression qu'elle était enceinte. Elle a pris cinq kilos. Elle a cessé d'uriner. Elle s'est inscrite à l'hôpital local, où elle est restée quatre jours, pendant que le personnel s'efforçait de gérer sa douleur, d'empêcher la formation de caillots sanguins et de protéger ses reins. « J'ai cru que j'allais mourir », dit-elle.
La journaliste Alison Motluck mentionne que certains médecins semblent minimiser les problèmes dont ils ont connaissance. Ainsi, immédiatement après le premier don d'Anna, celle-ci a commencé à vomir et à avoir des vertiges. Elle a été emmenée à l'hôpital en ambulance pour observation. Lorsque le médecin l'a laissée sortir, trois jours plus tard, il a écrit dans ses notes : « Il s'avère qu'elle a mangé un paquet de chocolats qu'elle avait dans son sac immédiatement après le prélèvement » (Anna conteste cette information).
Le médecin n'a pas mentionné le SHO (syndrome d'hyperstimulation ovarienne) dans ses notes, ni dans les notes de l'hôpital au moment où elle a été réadmise pour quatre jours supplémentaires d'hospitalisation. Sa consommation et son évacuation de liquide, les médicaments qu'il a prescrits et le fait qu'il ait dû drainer 2,5 litres de liquide de son corps sont autant d'éléments qui pointent vers la présence d'un SHO. Mais les mots utilisés dans le diagnostic étaient « gêne abdominale ».
Cinq mois après avoir fait son dernier don, Anna a été rencontrée par la journaliste Alison Motluck : elle n'avait pas encore recommencé à avoir ses règles. « J'ai réalisé à quel point il est grave d'altérer son système reproductif », a-t-elle déclaré. Elle s'était récemment mariée et espérait avoir des enfants. « Et si je devais faire appel à une donneuse d'ovules ? », a-t-elle demandé. Elle avait tout juste vingt-trois ans.
Peu de temps après, Anna s'est vu prescrire de la metformine, un médicament souvent utilisé pour traiter le syndrome des ovaires polykystiques, un déséquilibre hormonal qui peut entraîner des menstruations irrégulières. Après son dernier don, elle a développé des symptômes de ce trouble - acné, pilosité excessive, prise de poids - et a été diagnostiquée comme souffrant d'un syndrome des ovaires polykystiques « léger ». La metformine semble l'aider, mais elle coûte 40 dollars par mois et son médecin dit qu'elle devra la prendre pour le reste de sa vie.
À son premier don, Anna a dû être drainée et a pris des médicaments pour contrer le facteur de croissance de l'endothélium vasculaire et prévenir la formation d'un caillot sanguin. La deuxième fois, les médecins l'ont traitée avec une perfusion d'albumine pour restaurer son volume sanguin.
SINDY
Crédit Photo CANVA - Africa Images
TRADUCTION
Source:
The Money and Risks Behind Human Egg Donation- 16 juillet 2025 - par Ferrukh Faruqui pour "ThinkGlobalHealth
TRADUCTION
En 2001, Sindy Wei, une femme de 25 ans qui poursuivait des études supérieures en Californie, a décidé de compléter sa bourse de doctorat en échangeant ses ovules contre 6 500 dollars (environ 11 000 dollars en 2025). Aujourd'hui radiologue à l'université de Californie à Los Angeles, Sindy Wei pensait que le don de ses ovules lui permettrait de gagner un peu d'argent supplémentaire et d'aider quelqu'un d'autre à fonder une famille. À l'époque, Wei ignorait les risques médicaux à long terme liés au processus de don d'ovules.
Après que son médecin ait prélevé chirurgicalement près de 60 ovules de ses ovaires, soit trois fois plus que le prélèvement habituel de 20 ovocytes (ovules), Wei s'est effondrée et a failli mourir d'une hémorragie après que l'intervention ait sectionné une artère. Ce don a failli coûter la vie à Wei. Elle s'est également retrouvée avec une infertilité inexpliquée.
Lorsque Wei a décidé de fonder sa propre famille, près d'une décennie plus tard, elle a dû recourir à l'insémination intra-utérine avant de finalement donner naissance à des jumeaux. Vingt-quatre ans plus tard, elle souffre toujours de spasmes vésicaux suite à son opération d'urgence.
Wei affirme que son infertilité post-don n'a été enregistrée dans aucune base de données de patients. La clinique n'a pas maintenu le contact avec elle.
« Si je n'avais pas parlé, je pense que la plupart des gens ne sauraient pas vraiment comment ces choses peuvent arriver », dit-elle.