SOS GPA est un site destiné avant tout à informer les femmes qui envisagent de devenir mère porteuse ou pourvoyeuse d'ovocytes
Les litiges des contrats de GPA
Des clauses spécifiques de contrats ont donné lieu à des litiges et des règlements hors cour. La doctorante Stéphanie Carsley a analysé la façon dont le droit canadien se saisit du phénomène de la maternité de substitution et y répond.
Sa thèse consiste en une étude empirique (entretiens qualitatifs) menée auprès de vingt-six avocats spécialisés en la matière, en provenance de la Colombie-Britannique, de l’Alberta, de l’Ontario et du Québec 1.
Toutes ces clauses de contrat ont été rapportées par des avocats pratiquant pour l'industrie de la GPA au Canada et sont extraites de la thèse de doctorat en droit de CARSLEY, S. (2022), Surrogacy in Canada: Lawyers’ experiences, practices and perspectives,
Certaines de ces clauses ont engendré des litiges et des règlements hors cour. Nous en avons sélectionné quelques uns et les avons rassemblé par thèmes.
Note 1: Les litiges de clauses de contrat au Québec précédaient la loi québécoise de 2023 encadrant la GPA , ce qui veut dire que des contrats étaient signés entre des parties à une époque ils n'avaient aucune valeur juridique.
S’abstenir de relations sexuelles, parfois durant toute la durée de la grossesse ou pendant une certaine période, après l’implantation de l’embryon,
Obliger son partenaire à subir des tests médicaux
Restreindre ses choix alimentaires (ex. obligation d’aliments biologiques, pas de caféine, etc.) allant au-delà des recommandations médicales générales pour les grossesses.
Limiter ou interdire ses déplacements
S’astreindre à recevoir un nombre précis d’embryons à être implantés
S’engager à subir des nouvelles tentatives de FIV en cas d'échec, de fausse-couche ou de mortinaissance, (les FIV se traduisent par un taux de naissances vivantes de 25%)
Pour favoriser le transfert d’embryon, la mère porteuse doit prendre les médicaments suivants:
Pillule contraceptive, Lupron
Estrogen, Progesterone,
Medrol, Doxycycline, Aspirin
Accepter la présence des clients lors de ses rendez-vous médicaux
Renoncer à la confidentialité de son dossier médical
Accepter la présence des clients à son accouchement (incluant pour une procédure de césarienne)
S’astreindre à des modalités particulières d’accouchement incluant des césariennes
Signer des clauses de confidentialité qui interdisent aux mères porteuses de témoigner d'expériences négatives dans les médias et les médias sociaux.
Réductions embryonnaires
Des clients demandent pouvoir exiger de la mère porteuse qu'elle se soumette à une ou des réductions embryonnaires.
Des mères porteuses sont alors confrontées à des dilemnes éthiques ou moraux.
Le Projet de loi 12 (PL12) de l'Assemblée nationale du Québec a été sanctionné le 06 juin 2023 sous le nom de : Loi portant sur la réforme du droit de la famille en matière de filiation et visant la protection des enfants nés à la suite d’une agression sexuelle et des personnes victimes de cette agression ainsi que les droits des mères porteuses et des enfants issus d’un projet de grossesse pour autrui.
La question des contrats, appelés « conventions notariées » dans le PL12, est une préoccupation majeure qui touche directement les droits des mères porteuses. Les récits des avocats interviewés pour la thèse du Dr Carsley démontrent que la législation canadienne ne protège pas les mères porteuses ni ne dissuade les arrangements commerciaux.
Les rapports de force
Les contrats de GPA présentent des inégalités entre les parties. Les avocats qui rédigent ces contrats affirment eux-mêmes que :
"Beaucoup de ces contrats mettent tout le risque sur la mère porteuse”[1]
Les contrats de GPA visent en effet à ce que les clients obtiennent tous les bénéfices de l’entente (un enfant vivant) et que l’autre partie - la mère porteuse - s’engage à prendre tous les risques sans obtenir de bénéfice.
Le “risque” et la “vulnérabilité” du parent prospectif se traduisent essentiellement par un risque financier, ils n'engagent aucun risque pour leur santé. Des montants plus élevés sont offerts par les parents d’intention aux mères porteuses pour qu’elles acceptent de se soumettre à des interventions plus invasives (grossesse gémellaire, césarienne, etc.) monétisant ainsi les souffrances et les risques qu’elles prendront [2]
C'est ainsi que l'industrie interprète des "compensations à la mère porteuse" en fonction du degré de risques médicaux et de souffrances qui lui seront intentionnellement infligés et qu’elle est disposée à accepter. Dans sa thèse de doctorat, l'auteur K. Lavoie confirme ce lien transactionnel entre un paiement et l'infliction de souffrances à autrui:
"Comme l’expliquent Claudine et Kate, les risques qu’impliquent la grossesse pour autrui et le don d’ovules doivent être pris en considération. Une compensation vient alors, non pas payer pour l’achat d’une vie humaine, mais bien assurer une sécurité financière pour les femmes, en réponse aux risques et aux inconvénients qu’elles assument tout au long du processus."[3]
"I can see this discomfort...anytime money is associated with a human life, that makes people uncomfortable. But I don’t see paying a surrogate as purchasing a human life. I see it as remunerating her for the risks and the inconveniences that she takes on. I really think it’s up to a woman to decide if this is something that works for her. Then, she has the right to make that decision."
(Kate, femme porteuse)
Si la compensation financière pour des pertes de fonction, des pertes de membres ou des souffrances physiques et psychologiques existe bien dans le droit civil, elle vise des préjudices subis involontairement par la victime, elles ne visent pas la transaction d'une souffrance qu'elle accepte de subir contre rémunération. M. Lavoie note à la page 189 de sa thèse que certaines mères porteuses ont admis ne pas comprendre complètement la teneur des contrats:
"Pour les femmes porteuses qui formalisent leur entente avec les parents d’intention, le contrat représente la certitude que leur geste est posé en toute légitimité et n’est pas un acte criminel ou illégal. Cela leur procure une certaine paix d’esprit, même si plusieurs m’ont confié ne pas comprendre tout à fait les tenants et aboutissements de leur volumineux contrat d’une trentaine de pages."
Pour sa part, dans le résumé de sa thèse, la Dr Carsley invite :
[…] « les législateurs et les universitaires canadiens à prêter une oreille attentive à l’expérience vécue des avocats, dont la perspective s’avère éclairante pour qui s’intéresse à l’avenir juridique de la maternité de substitution »
La nature exécutoire des contrats de GPA : une controverse juridique
L'agence ontarienne Canadian Fertillity Consulting donne un exemple de ce que les contrats devraient encadrer sur son site internet. Dans sa section Droits et Responsabilités, l'agence commente ainsi:
" L'accord définit les droits et les responsabilités de toutes les parties concernées. Cela comprend l'engagement de la mère porteuse à mener la grossesse à terme et la responsabilité des parents d'intention de répondre aux besoins médicaux et émotionnels de la mère porteuse."
(Notre traduction)
Ainsi, selon l'interprétation de la loi canadienne faite par l'agence Canadian Fertility Consulting, la mère porteuse serait liée par contrat à mener sa grossesse à terme (point 8).
Certains avocats spécialisés dans les contrats de grossesse pour autrui ont confié à Mme Carsley qu'ils ignoraient si les contrats étaient "exécutoires". Rappelons que dans l'arrêt Daigle c. Tremblay 1989, la Cour suprême du Canada a tranché que le futur père ne possède pas de droit de veto quant aux décisions d’une femme relativement au fœtus qu’elle porte.
Au Québec, le législateur a prévu cette éventualité et protégé le droit à l'avortement des mères porteuses à l'article 541.8 (Code civil du Québec CcQ):
" Seule la femme ou la personne qui a accepté de donner naissance à un enfant dans le cadre d’un projet parental impliquant une grossesse pour autrui peut, en tout temps avant la naissance de l’enfant, mettre fin unilatéralement à la convention de grossesse pour autrui; elle doit alors le faire par écrit et en notifier copie à la personne seule ou aux conjoints ayant formé le projet parental. Dans ce dernier cas, la notification à l’un des conjoints est réputée faite à l’égard de l’autre. En cas d’interruption de la grossesse, il est mis fin à la convention de grossesse pour autrui sans autre formalité "
De plus, selon l'article 541.10 (CcQ), peu importe les dispositions du contrat de GPA, les parents bénéficiaires ayant eu recours à une mère porteuse québécoise ne peuvent lui exiger les montants de remboursements des frais occasionnés par sa grossesse, ni la compensation de salaire qui lui a été versée:
"Les montants versés en remboursement de certains frais et, le cas échéant, l’indemnité versée pour la perte de revenus de travail à la femme ou à la personne qui a accepté de donner naissance à l’enfant en raison de sa contribution à un projet parental impliquant une grossesse pour autrui sont insaisissables."
La teneur des contrats canadiens
La doctorante Stéfanie Carsley de l'Université McGill à Montréal a analysé dans sa thèse de doctorat " Surrogacy in Canada: Lawyers’ experiences, practices and perspectives " (2020) la façon dont le droit canadien se saisit du phénomène de la maternité de substitution.
Si le droit canadien ne permet pas au père génétique d'empêcher une femme d'interrompre sa grossesse on voit mal comment il pourrait l'autoriser dans le cadre d'une GPA, altruiste par surcroît?
Mme Carsley a mené des entretiens qualitatifs auprès de 26 avocats spécialisés dans ce domaine et pratiquant en Colombie-Britannique, en Alberta, en Ontario, et même au Québec, une province où les contrats étaient, pendant cette période, juridiquement de nullité absolue.
Elle a consigné de nombreux exemples sur la manière dont les avocats interprètent et appliquent les lois provinciales et fédérales liées à ce domaine de pratique, qui illustrent bien les dynamiques de pouvoir en cause.
Selon les témoignages recueillis auprès des avocats et présentés dans la thèse de Mme Carsley, certains contrats comporteraient en outre des clauses pénales et punitives. Des avocats utilisent ces clauses pour forcer la mère porteuse à prendre le « contrat au sérieux » et à se conformer aux exigences des parents d’intention, avec l’objectif éventuel de les faire déclarer exécutoires par un tribunal.[4]
Nous avons regroupé par thèmes les litiges rapportés par les avocats canadiens dans la thèse de Mme Carsley afin d'éclairer les enjeux et identifier quels sont les droits remis en cause au coeur même des pratiques de cette industrie.
DÉFINITION : La clause principale des contrats de GPA est l’engagement de la part de la mère porteuse à remettre l’enfant aux parents bénéficiaires.
Dans les litiges mettant en cause des mères porteuses souhaitant garder leur lien de filiation maternel, la très large majorité des arrêts de tribunaux tranchent en faveur des parents bénéficiaires, au Canada, au Royaume-Uni et aux États-Unis.
CLAUSES DEMANDÉES PAR LES MÈRES PORTEUSES DANS LES CONTRATS
Les mères porteuses demandent parfois une période de transition auprès de leur enfant pour pouvoir l’allaiter. 1
Certaines précisent la nature des contacts qu’elles aimeraient avoir après la naissance.
CLAUSES DEMANDÉES PAR LES PARENTS BÉNÉFICIAIRES DANS LES CONTRATS
Des parents bénéficiaires demandent pouvoir prendre des décisions concernant la santé de l’enfant dès sa naissance. D'autres prescrivent les modes contacts et leur durée que la mère porteuse pourra avoir avec l’enfant après la naissance. Par exemple, le temps et le moment où elle aura le droit de tenir l'enfant dans ses bras ou l'interdiction de le faire, etc.
LITIGES RAPPORTÉS PAR LES AVOCATS AU COURS DES ENTRETIENS
Révocation du consentement
Une avocate a rapporté un cas où la mère porteuse avait souhaité garder les enfants qu'elle avait porté. Le juge a octroyé la garde aux parents bénéficiaires. L’avocate a déduit, suite à ce jugement, que les contrats étaient “exécutoires” en Ontario2.
Révocation du consentement
Une avocate a mentionné avoir été contactée par une mère porteuse qui souhaitait révoquer son consentement après plusieurs mois après l’accouchement. L’avocate a refusé le dossier, car elle est d’avis que les mères porteuses ne devraient pas avoir le droit de changer d’avis3.
Droits de visite conclus révoqués
Des avocats ont rapporté le cas d’une mère porteuse de Colombie-Britannique, déçue du fait que les clients ne lui permettaient pas des contacts aussi fréquents avec l’enfant qu'ils avaient conclu. Elle a saisi les tribunaux pour rétablir ses droits parentaux. La garde provisoire a été accordée aux parents prospectifs pendant la période du règlement du litige
La demande de la mère porteuse n’a pas été reçue favorablement et les parents bénéficiaires ont obtenu les droits parentaux envers l’enfant.
Révocation des ententes conclues
Une mère porteuse ayant utilisé ses propres ovocytes en Ontario a refusé de signer le consentement en faveur des clients, de peur d’être exclue de la vie de l’enfant et de ne pas avoir les contacts promis4. La mère porteuse souffrait de dépression post-partum. La garde a été finalement accordée aux parents bénéficiaires.
Révocation des ententes conclues
Finalement une avocate rapporte le cas d’une mère porteuse qui n’a pas renoncé à ses droits parentaux car l’enfant était malade et elle souhaitait pouvoir prendre les décisions pour lui.
Les parents bénéficiaires ont intenté un recours légal. Le litige a été réglé par médiation, hors cour, en faveur de ceux-ci. La juge a mentionné à l’avocate que sa décision était guidée par le “meilleur intérêt de l’enfant” et qu’elle avait accordée de l’importance aux termes du contrat6.
La considération des termes du contrat
Finalement une avocate rapporte le cas d’une mère porteuse qui n’a pas renoncé à ses droits parentaux car l’enfant était malade et elle souhaitait pouvoir prendre les décisions pour lui. Les parents bénéficiaires ont intenté un recours légal. Le litige a été réglé par médiation, hors cour, en faveur des parents bénéficiaires.
La juge a notamment mentionné aux avocats que sa décision était guidée par le “meilleur intérêt de l’enfant” et qu’elle avait accordée de l’importance aux termes du contrat 6, ce qui semble aller dans le sens de l'hypothèse qu'ont certains avocats sur la nature exécutoire de ces contrats.
Indemnités pour bris de contrat
DÉFINITION : La menace que le contrat soit exécutoire au terme de la loi 1 (qu'il fasse "force de loi") donne de la valeur au contrat, selon une avocate rencontrée dans le cadre des travaux de recherche.
La question de non-respect de certaines clauses du contrat place les législateurs face à la réalité de la pratique de la GPA. Comment l'une ou l'autre des deux parties peut-être indemnisée quand l'objet d'un contrat est un enfant? Est-ce que les parents bénéficiaires peuvent refuser l'enfant si la mère porteuse a fumé ou bu de l'alcool pendant sa grossesse par exemple ? Peuvent-ils l'obliger à subir un avortement s'il est prouvé qu'une condition est imputable à son comportement comme vu récemment aux États-Unis ? Quels sont les recours de la mère porteuse si les parents refusent de payer?
Les litiges que nous exposons dans cette section sont extraits de la recherche de Mme Carsley et sont des exemples de bris de contrats qui trouvent des solutions par médiation. Comment un juge trancherait-il sur des questions qui mettent en cause les droits fondamentaux de la mère porteuse?
CLAUSES DEMANDÉES PAR LES MÈRES PORTEUSES
Aucune de signalée
CLAUSES DEMANDÉES PAR LES PARENTS PROSPECTIFS
Aucune de signalée
LITIGES RAPPORTÉS PAR LES AVOCATS AU COURS DES ENTRETIENS
Comment sanctionner les bris de contrats ?
Les “bris de contrat” sont les questions les plus complexes pour les avocats interrogés étant donné le flottement juridique sur la nature “exécutoire” de ces contrats.
Certains avocats 2 ont des positions claires sur l’interprétation des clauses relatives aux comportements de la mère porteuse.
Ils interprètent le rôle de ces clauses (et conséquemment le leur) comme dissuasif plutôt qu’exécutoire.
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Défaut de paiement de la part des parents bénéficiaires
Une avocate rapporte que des défauts de paiements de la part des clients sont survenus plusieurs fois après la naissance et l’obtention de leur enfant 5.
Procédures médicales
DÉFINITION : Les contrats détaillent les procédures médicales qui seront exigées de la mère porteuse, comme la prescription d'hormones synthétiques, la prescription d' inhibiteurs de la glande pituitaire, les implantations d'embryons ainsi que toutes les interventions obstétriques et gynécologiques relatives à la grossesse et à la naissance.
CLAUSES DEMANDÉES PAR LES MÈRES PORTEUSES
Certaines mères porteuses demandent à être suivies par une sage-femme ou un médecin en particulier1.
CLAUSES DEMANDÉES PAR LES PARENTS BÉNÉFICIAIRES
Certains parents bénéficiaires peuvent demander une évaluation psychologique et physique pour s’assurer de la santé de la mère porteuse. Ils ne souhaitent pas que cette dernière soit porteuse d’une maladie qu’elle risquerait de transmettre à l’enfant.
Des parents bénéficiaires demandent qu’une clinique particulière soit utilisée. Ils choisissent la provenance du sperme et des ovocytes. Certains précisent le nombre d’embryons qui seront implantés.
Des parents bénéficiaires stipulent le nombre de tentatives de transferts d’embryons qui seront exigés à la mère porteuse, ainsi que son engagement à faire des nouvelles tentatives de transfert d’embryons en cas de fausse couche ou d’un enfant mort-né.
Un médecin précis ou une sage-femme est parfois exigé, ainsi que les modalités de la naissance. Certains parents bénéficiaires demandent à la mère porteuse de signer une entente de divulgation afin qu’ils puissent avoir un accès direct au dossier médical et/ou demandent à être présent à tous ses rendez-vous médicaux.
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LITIGES RAPPORTÉS PAR LES AVOCATS AU COURS DES ENTRETIENS
Présence des clients aux rendez-vous médicaux et aux interventions gynécologiques et obstétriques
Une avocate rapporte qu'une mère porteuse ne souhaitait plus communiquer avec les parents bénéficiaires. Cependant, leur droit d’être présents aux rendez-vous médicaux était inscrit sur le contrat. La mère porteuse a dû accepter la présence de ces personnes lors de ses rendez-vous médicaux contre sa volonté 2.
Présence des clients aux rendez-vous médicaux et aux interventions gynécologiques et obstétriques
Des litiges ont été rapportés sur la présence des clients lors des rendez-vous médicaux mais des avocates interrogées ont mentionné que ces litiges se règlent souvent par voie de médiation 3.
Refus de se soumettre à une autre intervention médicale
Une mère porteuse a refusé de faire une tentative de transfert d’embryons supplémentaires et les clients ont dû trouver une autre mère porteuse 4.
Assurances et risques médicaux
DÉFINITION : Des clauses précisent que c’est la mère porteuse qui assume tous les risques concernant le transfert d’embryons (ce qui peut lui causer une infertilité) et qu’elle ne peut dans cette éventualité poursuivre les clients. Des clauses peuvent prévoir ’une assurance-vie ou d’incapacité ainsi que les montants prévus.
Des clauses peuvent prévoir l'exigence d'une réduction embryonnaire si des anomalies au foetus sont constatés.
Note: L'article 13 du Règlement relatif aux projets parentaux impliquant une grossesse pour autrui québécois précise que la mère porteuse : " [...] sait que la personne seule ou les conjoints ayant formé le projet parental ne sont pas responsables de ces risques". Lors des auditions publiques tenues à la Commission des institutions, le Ministre de la justice québécois a d'ailleurs refusé d'obliger les clients à prendre des assurances pour protéger la famille de la mère porteuse et la mère porteuse elle-même.
CLAUSES DEMANDÉES PAR LES MÈRES PORTEUSES
Certaines avocates qui représentent les mères porteuses négocient des montants d’assurance-vie plus élevés que d’autres 1.
CLAUSES DEMANDÉES PAR LES PARENTS PROSPECTIFS
Certains contrats peuvent préciser que si la mère porteuse est plongée dans un coma, elle serait maintenue en vie jusqu'à ce que le fœtus soit viable.
LITIGES RAPPORTÉS PAR LES AVOCATS AU COURS DES ENTRETIENS
Aucun litige n'a été rapporté dans la recherche sur ce sujet.
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Abstinence sexuelle
DÉFINITION : Les contrats peuvent demander que des tests médicaux soient effectués sur le partenaire de la mère porteuse, par exemple si ce dernier voyage dans un pays infecté par le Zika. Les clients peuvent restreindre l’autorisation de relations sexuelles à un partenaire déterminé1.
CLAUSES DEMANDÉES PAR LES MÈRES PORTEUSES
Certaines mères porteuses négocient une fenêtre d’abstinence ou encore une restriction à un partenaire spécifique plutôt qu’une abstinence complète 2.
CLAUSES DEMANDÉES PAR LES PARENTS BÉNÉFICIAIRES
Afin de s’assurer que l’enfant est bien relié génétiquement aux parents bénéficiaires, certains demandent que la mère porteuse s’abstienne de relation sexuelle, parfois durant toute la grossesse ou encore parfois pendant une certaine durée après le transfert d'embryon(s).
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LITIGES RAPPORTÉS PAR LES AVOCATS AU COURS DES ENTRETIENS
Bris de la promesse d'abstinence sexuelle
Un litige a été rapporté dans un cas de bris de cette clause d’abstinence.
Un test génétique a été fait après la naissance afin de s’assurer que l’enfant n’était pas relié génétiquement à la mère porteuse. Les clients étaient furieux contre la mère porteuse mais n’ont pas porté plainte après que le test ait confirmé que l’enfant leur était relié génétiquement 3.
Les restrictions à voyager
DÉFINITION : Les contrats peuvent aussi restreindre ou interdire certains déplacements pour la mère porteuse. Avant que la loi québécoise ne ne valide juridiquement la possibilité d'apposer des contrats sur les fonctions reproductives des femmes, certains clients demandaient aux mères porteuses de ne pas se rendre au Québec vers la fin de leur grossesse.
CLAUSES DEMANDÉES PAR LES MÈRES PORTEUSES
Certaines mères porteuses vivant à Ottawa ont négocié le droit de venir au Québec 1.
CLAUSES DEMANDÉES PAR LES PARENTS BÉNÉFICIAIRES
Des parents d’intention interdisent certains déplacements. Parfois, il s’agit d’une question d’assurance, par exemple en cas de voyages aux Etats-Unis. La mère porteuse devra alors assumer ses frais médicaux en cas de voyage.
D'autres restrictions de déplacement demandées par les parents d’intention concernent aussi des considérations juridiques. Le Québec est la province qui est particulièrement visée en 2016 par des restrictions de déplacement, en vertu, notamment, de ses lois qui occasionnaient des délais pour la reconnaissance de filiation des parents prospectifs.
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LITIGES RAPPORTÉS PAR LES AVOCATS AU COURS DES ENTRETIENS
Recours à des injonctions pour interdire des déplacements
Certains avocats pensent qu’il pourrait être possible d’obtenir une injonction dans l’éventualité où une mère porteuse voyagerait contrairement aux clauses de contrat 2.
Hygiène de vie et régimes alimentaires
DÉFINITION : Certains contrats exigent aux femmes de se soumettre à des régimes alimentaires ou de limiter certaines de leurs activités.
CLAUSES DEMANDÉES PAR LES MÈRES PORTEUSES
Les mères porteuses qui ont moins d’expérience ont tendance à accepter plus de restrictions. D'autres refusent certaines restrictions 1.
CLAUSES DEMANDÉES PAR LES PARENTS BÉNÉFICIAIRES
Certains parents bénéficiaires demandent que la mère porteuse restreigne ses choix alimentaires (ex. aliments biologiques, pas de caféine). Des demandes vont au-delà des recommandations médicales générales pour les grossesses. Des limitations d’activités sont aussi incluses.
Les parents bénéficiaires ne sont pas toujours en position d’insister trop, car si la mère porteuse refuse certaines contraintes ils risquent son désengagement du contrat 2.
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LITIGES RAPPORTÉS PAR LES AVOCATS AU COURS DES ENTRETIENS
Comportements en infraction avec les termes du contrat
Une avocate rapporte que lorsqu’il est constaté qu’une mère porteuse enfreint certaines règles (par exemple, on la voit sur une photo sur facebook fumer pendant sa grossesse) elle peut recevoir un appel de l’avocat ou de l’agence de mère porteuse pour qu’elle modifie son comportement 3.
LITIGES RAPPORTÉS PAR D'AUTRES SOURCES
Interdictions de certaines activités
Une mère porteuse rapporte que les clients avaient exigé qu'elle ne puisse pas prendre sa propre fille dans ses bras 4 :
"Il y a un couple qui ne voulait plus que je prenne ma fille dans mes bras. C’était important que je ne soulève aucun poids, ma fille incluse. On s’entend que je n’aurais jamais mis ma famille de côté pour porter un enfant. C’est sûr que je n’irais pas sauter en parachute enceinte. Il y a des limites qui vont avec la logique. Sauf qu’il y a des choses que je n’étais pas prête à accepter d’arrêter de faire. Je ne voulais pas mettre ma vie en suspens pour porter l’enfant d’une autre personne."
- (Virginie, femme porteuse)
Contrôle du comportement
"Les restrictions imposées à la femme porteuse sont soigneusement énumérées et décrites dans le contrat signé entre les parties.
Outre les prescriptions habituelles liées à la consommation d’alcool, de tabac et de drogues, d’autres spécificités peuvent s’ajouter selon les souhaits des parents d’intention : tenir à jour quotidiennement un journal alimentaire, interdiction de consommer certains aliments ou certaines boissons (fruits de mer, fromage, repas de restauration rapide, café, boisson gazeuse, etc.), ne plus faire de sport pendant la grossesse, s’engager à ne pas prendre l’avion ou à voyager au-delà d’une certaine distance du lieu de résidence, par exemple."5
Clauses de confidentialité et de communications
DÉFINITION : Certains clients inscrivent dans les contrats des obligations de communications et le type d'information qu'ils souhaitent recevoir de la part de la mère porteuse.
CLAUSES DEMANDÉES PAR LES MÈRES PORTEUSES
Aucune clause de rapportée
CLAUSES DEMANDÉES PAR LES PARENTS BÉNÉFICIAIRES
Certains parents bénéficiaires exigent des contacts quotidiens 1.
Certains parents bénéficiaires demandent à la mère porteuse de ne pas dévoiler son statut de mère porteuse, particulièrement sur les médias sociaux 2
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LITIGES RAPPORTÉS PAR LES AVOCATS AU COURS DES ENTRETIENS
Clauses de confidentialité
L'inclusion de clauses de confidentialité dans les contrats peut également rendre les mères porteuses réticentes ou effrayées à l'idée de parler de leurs expériences avec les chercheurs3 Ceci est particulièrement vrai si l'expérience a été malheureuse. Ceci explique partiellement pourquoi les médias ne présentent que des récits au dénouement "heureux" de GPA
Clause de confidentialité
Des avocates rapportent des litiges sur la question de la divulgation. Ainsi une mère porteuse forcée d'être alitée parce qu'elle vivait une grossesse à risque n’avait pas le droit de divulguer son rôle de mère porteuse 4 . Elle a menacé de ne pas signer le consentement à remettre l’enfant si on continuait à l'obliger de taire sa condition et sa situtation. Les avocats et les clients lui ont finalement permis de divulguer son statut de mère porteuse.
Obligation de communiquer
Une mère porteuse ne souhaitait plus communiquer avec ses clients. Son mari a dû exécuter le contrat en informant les parents prospectifs qui exigeaient des contacts sur une base hebdomadaire5