Au Canada, depuis le jugement de la cour suprême (arrêt Daigle c. Tremblay - 1989) l'avortement est permis parce que le foetus n'est pas considéré comme une "personne", au sens juridique.
Mais la pratique de la GPA tente de restreindre cet accès libre et gratuit en invoquant que la mère porteuse est liée par un contrat à mener sa grossesse à terme. Qu'en est-il au Québec et ailleurs ?
Au Québec, le législateur a prévu cette éventualité et a protégé le droit à l'avortement aux mères porteuses québécoises par l'article 541.8 du Code civile québécois (CCQ) :
" Seule la femme ou la personne qui a accepté de donner naissance à un enfant dans le cadre d’un projet parental impliquant une grossesse pour autrui peut, en tout temps avant la naissance de l’enfant, mettre fin unilatéralement à la convention de grossesse pour autrui; elle doit alors le faire par écrit et en notifier copie à la personne seule ou aux conjoints ayant formé le projet parental. Dans ce dernier cas, la notification à l’un des conjoints est réputée faite à l’égard de l’autre. En cas d’interruption de la grossesse, il est mis fin à la convention de grossesse pour autrui sans autre formalité ".
Pour éviter que des pressions monétaires ne s'exercent sur les mères porteuses, le législateur québécois a interdit, à l'article 541.10 (CCQ), aux parents prospectifs ayant eu recours à une mère porteuse québécoise, la possibilité d'exiger les remboursements des frais occasionnés et la compensation de salaire perçue pendant sa grossesse.
"Les montants versés en remboursement de certains frais et, le cas échéant, l’indemnité versée pour la perte de revenus de travail à la femme ou à la personne qui a accepté de donner naissance à l’enfant en raison de sa contribution à un projet parental impliquant une grossesse pour autrui sont insaisissables."
Par contre, le législateur québécois n'a pas jugé utile de préciser si une mère porteuse pouvait refuser un avortement ou une réduction embryonnaire.
Certains avocats spécialisés dans les contrats de grossesse pour autrui ont confié à la chercheuse Stefanie Carsley dans sa thèse de doctorat " Surrogacy in Canada: Lawyers’ experiences, practices and perspectives " (2020), s'interroger à savoir si les contrats de GPA étaient "exécutoires" (p. 186). Il est plus que probable que les tribunaux auront à trancher cette question:
Peut-on forcer une femme à donner naissance ?
Peut-on forcer une femme à adopter un régime alimentaire ?
Quels sont les recours si elle refuse ?
Peut-on forcer une femme à se soumettre à des procédures médicales invasives ?
Quels sont les recours si une femme refuse de soumettre à un Xième transfert d'embryons si elle a déjà fait une ou plusieurs fausses-couches?
Chacune des provinces canadiennes a sa propre législation concernant les contrats de GPA.
L'agence ontarienne Canadian Fertillity Consulting (CFC) donne un exemple de ce que les contrats devraient encadrer sur son site internet et laisse entendre que les contrats sont exécutoires. L'agence ne mentionne pas quels seraient les recours si une mère porteuse refuserait de mener sa grossesse à terme et semble suggérer qu'au Canada, des tiers peuvent forcer une femme à avoir un enfant.
DANS LA SECTION DROITS ET RESPONSABILITÉS, L'AGENCE CFC COMMENTE :
" L'accord définit les droits et les responsabilités de toutes les parties concernées. Cela comprend l'engagement de la mère porteuse à mener la grossesse à terme et la responsabilité des parents d'intention de répondre aux besoins médicaux et émotionnels de la mère porteuse."
(Notre traduction)